Boko Haram : innovations guerrières depuis les monts Mandara

par Christian Seignobos

Maître de la brousse, assiégeant et terrifiant les villes, Boko Haram s’implante inexorablement et par-dessus les frontières nationales dans toute l’aire d’extension du royaume du Bornou. La prise des monts Mandara sur la frontière du Cameroun en 2014 offre à la « secte » un sanctuaire de repli. Les populations montagnardes voient dans Boko Haram le retour des razzias précoloniales et la reprise d’anciennes rivalités. L’embrigadement au service de Boko Haram passe par une islamisation à outrance. Toutes les communautés sont sommées de choisir pour ou contre ce nouvel ordre islamique plongeant nombre de régions dans un climat de guerre civile.




Cartes et photos associées
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Les stratégies guerrières s’inventent aujourd’hui dans le Sahel. Mais les techniques de guerre de Boko Haram sont directement issues des pratiques de coupeurs route qui les ont précédés et d’éléments qu’ils ont incorporés dans leurs rangs, tout comme le faisait la Seleka en République centrafricaine. Comme nous pouvons le voir sur ce dessin, l’expédition qui passe la frontière est composée de quatre-vingt-dix combattants montés sur trente motos (trois par moto).

Dessin de Christian Seignobos, 2015.

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Carte des toponymes cités dans l’article

Cette carte montre les zones contrôlées et sous influence de Boko Haram au Nigeria et à l’extrême nord du Cameroun. Elle permet également de situer géographiquement les toponymes cités dans l’article de Christian Seignobos. Au Cameroun, la zone sous influence de Boko Haram court sur environ 10 km, distance qu’un homme peut facilement parcourir à pied la nuit. Les officiels camerounais ont eux interdiction de se prendre à moins de 30 km de la frontière avec le Nigeria, zone appelée « zone d’insécurité des 30 km ».

Sources : IGN et données de Christian Seignobos, 2015. Édigraphie, 06/2015.

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La moto chinoise est consubstantielle à Boko Haram. Elle est la reine des batailles. Le conducteur, « cascadeur », assis sur le réservoir tient le guidon légèrement relevé, le passager à l’autre extrémité sur le prolongement métallique du siège est le « mitrailleur », le troisième au milieu indique les cibles et alimente en munitions. Cette cosaquerie motorisée qui associe moto chinoise, kalachnikov et téléphone portable se révèle particulièrement efficace, particulièrement face à l’armée qui, ne pouvant opposer de voltigeurs motorisés, est en retard d’une guérilla.

Dessin de Christian Seignobos, 2015.

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Au premier plan, des ruines végétales d’Acacia ataxacantha recouvrent des lignes d’Euphorbia unispina. Aujourd’hui réduites à de simples haies, elles canalisent le bétail. Les toitures mafa sont couvertes de cannes de petit mil, celles tôlées sont encore rares. Dans les années 1914-1919, les razzias des Peuls de Madagali s’accompagnaient d’incendies de quartiers entiers. Elles étaient à ce point régulières que les Mafa de Dloubam et de Magoumaz renonçaient à couvrir leurs toitures ne laissant que le cône de terre qui soutenait les litages de chaume. Boko Haram, dans ses raids, incendie systématiquement les villages insoumis.

Dessin de Christian Seignobos, 2015.

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Carte du relief et des groupes ethnolinguistiques

Cette carte du relief, à la frontière entre le Nigeria et le Cameroun, représente l’altitude moyenne de cette région, sanctuaire pour les combattants de Boko Haram. Par manque d’informations sûres et vérifiées, nous n’avons pas pu noter sur la carte les bases et les campements de la secte. Nous avons privilégié la représentation de l’environnement montagneux transfrontalier caractéristique des monts Mandara.

Sources : IGN et données de Christian Seignobos, 2015. Édigraphie, 06/2015

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Carte de situation

Cette carte de situation inscrit dans une géographie le phénomène Boko Haram, dans les zones montagneuses, appelées monts Mandara, à la frontière entre le Nigeria et le Cameroun.

Sources : IGN et données de Christian Seignobos, 2015. Édigraphie, 06/2015

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