Des pasteurs transhumants entre alliances et conflits au Tchad

par Dangbet Zakinet

Les questions d’agropastoralisme et de sécurité sont aujourd’hui au cœur de l’actualité dans l’espace sahélo-saharien. Considéré par certains comme un système archaïque, l’élevage mobile permet néanmoins aux éleveurs d’accéder aux ressources dispersées et d’entretenir des alliances avec les agriculteurs. Les performances de ce système sont également démontrées sur le plan économique. Au Tchad, comme dans les autres pays agropastoraux, les rapports entre transhumants et agriculteurs se sont par endroits tendus ces dernières années à cause du dérèglement de l’accès aux ressources. Cette étude compare deux types de transhumants dans la région du Tchad central : les Arabes Salamat Sifera et les Arabes Djaatné. Grâce à leur mobilité, les premiers connaissent moins de conflits que les derniers. Cet article tente d’en expliquer les réalités.




Cartes et photos associées
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Cette prise de vue montre un berger Arabe Nawala et son troupeau dans la plaine de Matala. À la suite d’un conflit, cette plaine a été réservée aux Arabes Nawala, placés sous l’autorité administrative du chef de canton Djaatné, localisé à Battal non loin d’Ati. Les Arabes Awada, quant à eux, ont été sédentarisés dans un autre territoire et dépendent du sultan du Fitri.

Photo de Christine Raimond, plaine de Matala, Tchad, février 2016.

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Sur cette photo figure le mémorial des Arabes Djaatné Nawala. Cet enclos entretenu en bordure de la mare Matala et réfectionné chaque année contient les tombes de Nawala morts lors des affrontements avec les Arabes Awada au début des années 2000.

Photo de Christine Raimond, plaine de Matala, Tchad, février 2016.

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Sur le lac Fitri, cette photo montre une vue de l’embarcadère à Yao. Les chenaux sont aménagés par les pêcheurs dans la végétation aquatique pour gagner les eaux libres où sont pratiquées les activités de pêche, d’élevage et de maraîchage au fur et à mesure de la décrue.

Photo de Christine Raimond, Yao, Tchad, janvier 2016.

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Sur les terres de Zania, en amont du delta du Batha (Fitri), cette prise de vue montre au premier plan une tente, un campement arabe Massalit. Les familles Massalit viennent chaque année passer la saison sèche avec leurs troupeaux. En février-mars, après les récoltes des sorghos repiqués et la consommation des tiges par les animaux, ces familles nomades partent pour plusieurs mois dans les îles du lac, puis ils remontent pour la saison des pluies dans les terroirs d’attache sahéliens plus au nord.

Photo de Christine Raimond, Zania, Tchad, janvier 2016.

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Descente des pasteurs Salamat Sifera de septembre 2006 à février 2007

Entre septembre 2006 et février 2007, l’auteur a suivi le parcours de transhumance des Salamat Sifera pendant leur descente du nord du fleuve Batha au sud, de campement en campement, pour ses enquêtes de terrain. Il a pointé les différents sites de campement et noté lors de chaque déplacement la date d’arrivée dans le nouveau campement comme des chameliers. Chaque année, ils séjournent en saison de pluies au nord du fleuve Batha (Ouadi-Hadad, Ouadi-Karma) et descendent en saison sèche au sud de la région du Guéra. En fonction de la pluviométrie, la montée au nord du fleuve Batha se fait généralement en juillet et la descente à partir du mois de septembre. Sur les itinéraires de transhumance, les Salamat Sifera entretiennent des relations avec les autres communautés (arabes ou non arabes) à travers des liens de parenté, mais pasteurs nomades. Ils essaient de contourner les zones conflictuelles et se dispersent en petits groupes dans les endroits où il y a des champs non récoltés.

Sources : Carte routière IGN 1/1 500 000. Élaboration par le Programme d’hydraulique pastorale au Tchad central (PHPTC), 2006-2007. Édigraphie, 01 /2016.

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