Élites, pouvoir et régulation à Madagascar

par Mireille Razafindrakoto

      François Roubaud

      Jean-Michel Wachsberger

Cet article vise à fournir un cadre interprétatif de la trajectoire malgache sur le long terme en retraçant les nœuds structurants de son économie politique. La concomitance de périodes d’expansion économique et de crises politiques laisse en effet supposer qu’une des sources essentielles des difficultés rencontrées par le pays est sa faible capacité à instaurer un consensus politique stable autour des processus d’accumulation et des modes de répartition des richesses. Dans cette hypothèse, la compréhension de la trajectoire malgache passe par une relecture de l’histoire longue en vue de mettre en évidence, de la période coloniale à nos jours, les principaux acteurs, les sources de pouvoir et de richesse, les modes de régulation économique et sociale et les contradictions du système. Nous distinguons six grandes périodes, chacune séparée par une nette rupture qui ne réussit pas à en résoudre les principales contradictions.




Cartes et photos associées
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Une seconde remise des pleins pouvoirs. Le 5 février 1975, à Ampahibe, le général de division Gabriel Ramanantsoa (à droite), deuxième président de la Première République malgache, remet les pleins pouvoirs au colonel de gendarmerie Richard Ratsimandrava, jusqu’alors ministre de l’Intérieur (à gauche). Lui-même investi des pleins pouvoirs par le président Philibert Tsiranana, le 18 mai 1972, suite au grand mouvement citadin de contestations sociales et politiques, la « révolution » malgache du 13 mai 1972, le général Ramanantsoa, premier officier supérieur à devenir général de l’armée malgache, est devenu Premier ministre, fonction qui n’existait plus depuis l’indépendance (voir le repère p. 144). Tsiranana reste malgré tout président, mais il est finalement destitué à la suite du référendum du 8 octobre 1972. Les pleins pouvoirs sont maintenus et Ramanantsoa devient officiellement le deuxième chef d’État de la République malgache dès le 11 octobre. Largement contesté lors de la « transition militaire » (1972-1975), Ramanantsoa décide de démissionner et privilégie le colonel Ratsimandrava, jeune officier porteur d’une théorie néo-traditionnelle centrée sur le réinvestissement des fokon’olona, des communautés villageoises.

Photo de l’agence ANTA à Antananarivo, Album CO8, 5 février 1975.

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Un camp de travail du SMOTIG. Cette photographie a été prise le 25 juin 1930 à Tanamboa au nord-est de Tuléar (sud-ouest de Madagascar). Elle représente un camp de travailleurs du SMOTIG (Service de main-d’œuvre et des travaux d’intérêt général) avec ses baraquements alignés, entourés de barbelés. Créé en 1926, après la création des Offices de la main-d’œuvre, le SMOTIG est une forme de travail forcé qui complète jusqu’en 1937 le système des prestations (nombre de journées de travail obligatoire pour l’administration publique) en mettant au travail les conscrits non retenus par le service militaire. La politique d’« aménagement » des territoires coloniaux, appelée politique de « mise en valeur des colonies » chère aux théories du ministre des Colonies Albert Sarrault, s’appuyait sur la mise au travail forcé des populations.

Cette photographie est issue des fonds d’archives photographiques de l’Agence nationale d’information « TARATRA » (agence ANTA) à Antananarivo. En 1931, le gouverneur général Léon Cayla crée à Tananarive un Service photographique et cinématographique. Après la Seconde Guerre mondiale, en 1946, a été créé à Ambohidahy un Service photo de l’information sous l’égide du gouverneur général De Coppet qui avait mis sur pied un Service général de l’information. En 1977, les archives du Service photo de l’information ont été officiellement transférées à l’Agence nationale d’information « TARATRA » (ANTA), nouvellement créée sous la Deuxième République. Elle forme un total de près de 400 000 photos et clichés et représente un patrimoine national unique en matière de photographie puisqu’elle détient la quasi-totalité des archives photographiques nationales. Une partie de ces archives est détenue par d’autres fonds : le fonds Grandidier et le Foibe Taontsarin-tanin’i Madagasikara (FTM).

Photo de l’agence ANTA à Antananarivo, Album SMT, n° 1, 25 juin 1930.

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